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  • Photo du rédacteurAnne

Une histoire de pigeons - #5

Trois matins. Trois matins d'affilée. Trois réveils de suite tirée du lit par des roucoulements incessants. Pas en semaine, évidemment. Le temps d’un week-end prolongé, s’il vous plaît. Ces pigeons ont repéré les jours fériés pour mieux me réveiller. Sales bêtes.


A ce moment-là, je n’ai qu’une idée en tête : un pigeoncide. Mais il est 7h et je n’ai pas l’esprit encore assez clair pour échafauder un plan. A la place, je me jette instinctivement sur la porte-fenêtre, l'ouvre d’un geste vif et maudis le volatil qui s’envole instantanément vers le toit d’en face. Puis je retourne me coucher. Pour le pigeoncide, merci de revenir après 9h.


Bon,je râle, je râle… mais il n’empêche, je n’ai pas œuvré pour rien ces derniers mois. A part cette nouvelle incursion pigeonnière (je suis sûre que c’est toujours le même, je le reconnais à son roucoulement !), comparé au début du confinement, j’ai une paix somme toute relative. Les visites sont moins légion, les bestioles ayant enfin compris qu’il y avait quelqu’un dans l’appartement. La fête à toute heure et le projet d'installation d’un nid familial dans un recoin, c’est fini. Depuis le déconfinement, il m’arrive toutefois de m’absenter quelques jours. Quand je reviens, je constate le retour d’un squattage mais celui-ci reste modéré. Ceci dit, faudrait pas que je parte plus d’un mois. Ce serait un véritable carnage.

Dispositif d'absence prolongée anti-atterrissage (c)AR

J’ai constaté que ces piafs ne s’intéressent qu’à la moitié de mon balcon, la plus à l’abri du vent. Celle à côté de ma chambre. L’autre moitié ne semble pas avoir leurs faveurs, car plus exposée : les pigeons craindraient-ils le vent frisquet ? A force d’observer leur comportement, j’en viens à me demander si je ne devrais pas envisager une thèse sur le sujet. J’aime même un titre possible : « Les pigeons des villes, bourreaux opportunistes ou volaille influençable ? ».


Je peux donc annoncer que la concorde n’est pas loin. Non, l’entente cordiale, plutôt. Une cohabitation tolérée, éventuellement. L’acceptation ? Ah non ! Le renoncement ? C’est tentant mais je ne peux m’y résoudre : je mets un points d’honneur à ne pas me déclarer vaincue. Disons qu’un certain seuil de tolérance s’est instauré. Je ne me vois pas chasser le pigeon au moindre battement d’aile. Alors j’accepte qu’ils squattent de temps en temps, attends que leurs méfaits sèchent et donne quelques coups de brosse sur le muret. Si les pigeons avaient des téléphone portables, je suis sûre qu'ils se filmeraient en train de squatter et posteraient la vidéo sur les réseaux sociaux. Mais ils n'ont pas internet et tant que ça ne m’empêche pas de profiter du balcon, je tolère.


Seuil de tolérance : 5/10. (c)AR

Toutefois, je constate que j’ai développé une aversion pour tout ce qui ressemble, de près ou de loin, à un pigeon. J’en ai même parlé à mon psy, l’autre jour, d'un air sarcastique. « Je les hais », lui ai-je déclaré (vu le prix de la séance, je vous rassure, l'heure entière n'a pas porté sur ce sujet). Je n’y peux rien, ils me suivent partout. Lors de ma toute première balade post-confinement une chose colorée a attiré mon attention vers une vitrine. Je suis tombée nez à nez avec un jeu de cartes nommé... « Pigeon pigeon ». Je suis allée voir le site internet du jeu sur lequel est écrit, entre autres : « Auto-édité, imprimé et assemblé en France. Pigeon Pigeon n'a pas fait 10.000 km avant d'arriver dans votre salon ». Moi, ils n’ont pas fait 10 m pour finir sur mon balcon.

Si c'est pas de la provoc '... (c)AR

L’autre jour, je pique-niquais dans un parc, quand la copine d’un ami s’est extasiée devant deux colombes qui passaient tout près de nous. J’ai d’abord eu un mouvement de réticence, ne les quittant pas des yeux, persuadée qu'elles allaient finir par squatter notre aire de déjeuner. Le symbole de paix était bien loin, je ne voyais que deux volailles prêtes à nous canarder. Conditionnée, je suis. Ma vie ne sera désormais qu’une succession de visions de pigeons.

Deux colombes innocentes ? Non, deux pigeons blancs échafaudant un plan ! (c)AR

D’ailleurs, alors que j’écris les lignes de ce dernier épisode de ma série aviaire, je les vois batifoler sur l’immeuble d’en face, aller et venir sur la gouttière, s’envoler et rejoindre le toit de mon immeuble. Je suis sûre qu’il doit y en avoir un ou deux sur mon balcon ! Du salon, je n’entends pas leurs roucoulements. Je vais aller voir, tiens…

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(Quel suspens !)

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Ah ben non.

Merde, je deviens pigeonnoïaque.


Ce que je redoute le plus, c’est que le pigeon ne finisse pas prendre trop d’espace et remplace un autre oiseau qui occupe déjà une place importante dans ma vie : le manchot. Jusque-là, on m’envoyait des cartes postales et l’on m’offrait toutes sortes d’objets à l’effigie de l’animal austral (statue, peluche, livre, point de croix, baume à lèvres, chaussettes, torchon, mug, plateau, DUPLO®,... ). L’autre jour, une amie m’a envoyé une photo, certes très drôle, avec un pigeon. Dois-je y voir le début d’une usurpation ?


En même temps, je n’ose imaginer l’état de mon balcon si des manchots venaient un jour à s’y soulager…

The End (enfin j'espère).


Pigeons - Anne : ex aequo.


La mort du cygne... et un pigeon confus (c)BalletToThe People

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